Essai sur le bon usage des pavillons sur les bateaux de plaisance

Navigation

Ce sujet fait partie de l'étiquette navale que nous avons tous tendance à oublier. Il comporte pas mal de particularités. Pourquoi ne pas s'en souvenir et maintenir en vie une tradition séculaire qui fait la richesse d'un patrimoine. Ceci même à notre petit niveau individuel.


Comme je n'ai pas la science infuse et que mes connaissances sont limitées à ce que je pratique, j'ai rassemblé pas mal de documents pour vous en faire une synthèse qui se veut pratique avant tout. A cet effet, j'ai essayé de me limiter à l'usage dans la plaisance.


Mais force est de constater que l'étiquette des pavillons n'est pas toujours une science exacte et suivant la nationalité des documents, l'usage n'est pas nécessairement le même. Lançons-nous tout de même dans le sujet. 

PAVILLON NATIONAL


Apparence :

Le pavillon national, également appelé « Couleurs », sert à identifier la nationalité du navire et éventuellement son statut. Il n'y a aucun « drapeau » à bord. Ce n'est pas un terme marin.


Le pavillon maritime peut différer totalement du drapeau national comme au Royaume Uni par exemple : Union Jack pour le drapeau et Red Ensign pour le pavillon national de plaisance (il y en a d'autres). 

Union Jack

Red Ensign

Les pavillons nationaux de plaisance peuvent également présenter diverses apparences dans le même pays (UK : Blue Ensign, Belgique : couronne en haut de la bande noire pour les bateaux membres d'un Club nautique fédéré, …)


Le statut du navire peut parfois être clairement établi : un bateau militaire belge porte un pavillon complètement différent des autres pavillons de la marine belge. 

Pavillon normal à gauche et Marine Nationale à droite.

En France, c'est plus subtil. Si l'apparence est la même que le drapeau tricolore, il est tout de même légèrement différent. La largeur des bandes est progressive : bleu 30%, blanc 33%, rouge 37%. Ceci pour donner l'impression de largeurs identiques lorsque le pavillon flotte au vent. Logique, car la dernière tranche (rouge) ondule plus que la première (bleue) qui est attachée au mâtereau.

Taille :

Le pavillon national doit être proportionnel à la taille du navire. Si le minimum semble laissé à l'appréciation du skipper, le maximum est d'1/10 de la taille du bateau, à la condition expresse que le pavillon ne touche jamais l'eau, ni le pont.


Pour un bateau de 15 m , le pavillon fera au maximum 1,5 m de long et 1 m de haut puisque les pavillons sont au format 2/3 (guindant = 2/3 battant). Dans cet exemple, le pavillon est très grand. Mais quel charme qu'un grand pavillon national sur un classic boat !


Le pavillon national doit être le plus grand pavillon arboré à bord. Par respect pour le pays d'enregistrement, le pavillon doit être en bon état (pas d'usure ou de déchirure). Comme la plupart du temps ces couleurs sont celles de votre propre pays … songez-y ! 

Pavillon National très très usé …

Pavillon National monté sur un mâtereau incliné.

Pavillon National se hissant en tête d’artimon.

Emplacement :

Le pavillon doit être hissé à bloc. Le pavillon ne peut pas être fixé sur le pataras. Ne pas respecter ces deux points implique une signification particulière : le deuil.


En navigation :

  • Gréement sloop : il se place sur un mâtereau droit (également appelé digon) à la poupe. L'ouvrage 3C du Shom (Signalisation maritime) précise que si le skipper est titulaire d'un brevet de capitaine, le national se porte à tribord, mais s'il ne l'est pas, il se porte à bâbord. Donc dans la majorité des cas de plaisanciers... Le mâtereau peut être incliné vers l'arrière pour mieux présenter le pavillon avec peu ou pas de vent.
  • Gréement ketch ou yawl, il doit être installé en tête de mât d'artimon ou de tape-cul. Une petite drisse extérieure déportée sur l'arrière résout ce problème.
  • Gréement aurique, il doit être installé en bout de corne.
  • Gréement goélette, il doit être installé en tête du grand mât.


Au mouillage ou au port :

  • Pour tous les gréements, le pavillon doit être à la poupe comme indiqué pour le sloop. Ce qui implique un double système pour les gréements autres que sloop. Pas de chance …


Horreur étiquetée : 2 pavillons nationaux à l’arrière de ce bateau.

Usage :


Deuil :

Le pavillon flottant librement est hissé à bloc, puis descendu lentement à mi hauteur. Comme sur nos sloops, le mâtereau est bien souvent trop petit pour que cela ait un sens, la solution de remplacement est d'utiliser une drisse et le pataras. Le signe de deuil sera alors le pavillon national porté à mi hauteur du pataras. Ce devrait être le seul cas de l'utilisation du pataras.


Le deuil se porte le jour de l'annonce du décès, jusqu'au coucher du soleil. Pas plus. Le deuil est porté en cas de décès du propriétaire, d'un membre important du club nautique ou du chef d'Etat ou du Chef de la famille régnante.


Salut :

Pour mémoire, car même si les mouvements de pavillon national pour le salut restent d'application, ils ne sont en pratique, pas utilisés pour la plaisance. Les puristes ne seront pas d'accord. 

A hisser les couleurs sur le «Pamir» !

LES AUTRES PAVILLONS


La règle veut que les pavillons soient toujours envoyés seuls sur une drisse. Ce qui implique d'installer plusieurs drisses de pavillon. Ce n'est pas compliqué à faire. Juste une paire de pontets à riveter sous les barres de flèches et quelques mètres de bout de 5 mm .


Seuls les pavillons du « Code International des Signaux » peuvent être superposés, pour signifier un message standard. A ce propos, est-ce que la superposition des pavillons N et C vous dit quelque chose ? 

Codes superposés : OK

Les pavillons de courtoisie

Témoignage de respect envers le pays qui accueille le bateau, le pavillon de courtoise s'envoie à bloc à tribord, sous le premier étage de barre de flèche du mât le plus en avant. Il est obligatoire de le faire dès l'arrivée dans les eaux territoriales du pays en question.


Comme pour le pavillon national, le pavillon de courtoisie n'est pas nécessairement le même que le drapeau national (ex. UK). Par contre, il est toujours de forme rectangulaire. La taille « courtoise » est de 30 x 40 cm .


Au mouillage et au port, les pavillons de courtoisie se rentrent aux mêmes moments que le pavillon national (= pas de pavillons la nuit). 

Le pavillon «Q»

Histoire : Le pavillon "Q" s'appelle le "pavillon de quarantaine". Il n'a à l'origine rien à voir avec la capitainerie, les douanes ou l'immigration mais avec les autorités sanitaires du pays ou port approché.

Il était traditionnellement hissé à l'arrivée dans un port en raison des nombreuses épidémies et maladies que les navires pouvaient apporter. Afficher ce pavillon signifie en quelque sorte que le navire est en quarantaine (Q) jusqu'à ce que les autorités portuaires (sanitaires) donnent l'aval de la libre pratique.


Par extension, afficher le pavillon de quarantaine Q équivaut à dire "mon navire est indemne, je demande la libre pratique".

De nos jours, la mise en quarantaine, par contraste, est affichée par le pavillon Lima (L).


Aujourd'hui : le pavillon "Q" (tout jaune) s'envoie à bloc à bâbord, sous le premier étage de barres de flèche du mât le plus en avant. Ce pavillon du « Code International des Signaux » indique que vous demandez la « libre pratique », c'est-à-dire le droit de pénétrer et d'accoster dans les eaux du pays en question (immigration – douanes – police – santé – capitainerie). Il est obligatoire de l'arborer dès l'arrivée dans les eaux territoriales de certains pays non européens (à nouveau vrai pour le Royaume Uni), même si des deux côtés de l'Atlantique, cela se pratique de moins en moins. C'est vous qui devez vous déplacer vers les bureaux officiels et rarement les officiels qui viennent à vous.


Une fois les formalités effectuées, le pavillon « Q » peut être rentré. Et céder sa place à d'éventuels autres pavillons (voir ci-dessous).



La pavillon de Club ou guidon

Comme vous êtes fier de votre Club, l'étiquette vous oblige à le porter aux nues, c'est-à-dire au point le plus haut du bateau. Comme son installation est une contrainte, il est permis de l'y laisser à poste tant que le bateau est utilisé. On l'appelle guidon, car sa forme est triangulaire (battant = 2 guindant). Comme nos têtes de mâts deviennent de plus en plus encombrées d'antennes et accessoires en tous genres, le guidon de Club à tendance à disparaître ou à descendre d'un étage sous les barres de flèche bâbord. Ce qui est en principe infâmant. 

Question subsidiaire : STW n’étant pas un club nautique mais une association, où faire flotter son pavillon ?

Le pavillon de propriétaire

Il ne peut être semblable à un pavillon national ou à un signal du « Code ». C'est le moment d'être créatif et de laisser votre « ego maritimum » s'exprimer.


Il peut être rectangulaire ou triangulaire. Il doit se hisser sur la drisse de pavillon tribord, sauf dans le cas où un pavillon de courtoisie est requis. Alors et seulement alors, il s'envoie sous la barre de flèche bâbord. Le pavillon de propriétaire ne s'arbore que s'il est lui-même à bord et on ne navigue pas avec ce pavillon.


Toutefois, il semble admis qu'au cas où la nationalité du propriétaire est différente de celle du bateau, il puisse hisser les couleurs de son pays en lieu, place et aux mêmes conditions que le pavillon de propriétaire. 



Le pavillon d’invité

Si vous recevez des invités étrangers à bord, il est de bon goût d'arborer le pavillon national du plus important d'entre eux sur une drisse de pavillon à bâbord. Des choix diplomatiques en vue … 

Erreur diplomatique et d’étiquette : 2 pavillons d’invités sur une même drisse.

Préséance des pavillons

Pour arborer tous ces pavillons, il va falloir beaucoup de drisses. Votre voilier va bientôt avoir l'air d'un bateau jury au départ d'une régate et l'écoulement d'air ne sera pas optimum entre vos voiles. Il faudra donc faire quelques choix judicieux dont vous serez seul juge. Surtout à bâbord …


Pour respecter la préséance, vous hisserez toujours dans l'ordre : pavillon national – courtoisie – propriétaire – invité. On les rentre dans l'ordre inverse.


Pavillon de course

C'est le seul pavillon qui trouve sa place normale sur le pataras et le seul à pouvoir flotter sans le pavillon national. S'arbore uniquement durant la régate suivant les instructions de courses.


Pavillons de région

L'Europe des régions est en mouvement. Le signe de ralliement régional est souvent un fanion typé (Bretagne, Catalogne, Corse, Zeeland, Etat de Bahia, etc …). 

Ceux qui se reconnaissent d'une région et qui soutiennent son identité peuvent arborer le fanion de celle-ci sous les barres de flèches bâbord (esprit de pavillon de propriétaire). Par contre, vous pouvez souhaiter honorer cette région si vous êtes de passage dans celle-ci. Il faut alors le hisser à tribord (esprit de pavillon de courtoisie). Jamais à l'arrière, à la place du pavillon national à peine d'amende. 

L'Europe est une grande région et doit être traitée comme telle. Le drapeau européen, n'a actuellement pas sa place comme pavillon national, même avec un insert (canton) national. On peut l'utiliser au même titre que ci-dessus.


Pavillons divers

Certains bateaux arborent des fanions publicitaires sous les barres de flèche ou un grand pavillon publicitaire hissé à mi-course sur l'étai durant les évènements festifs au port. Nous sommes évidemment en dehors de toute étiquette. Alors plus de raison de ne pas se lâcher ...


Quant au Jolly Roger (pavillon « Pirate »). Son utilisation est d'un mauvais goût achevé et dénote d'une amnésie « @%?#]|§{ée » de son utilisateur. 

Voici le seul cas où il est chaudement recommandé de faire n’importe quoi !

Pavillons du «Code International des Signaux»

Certains sont obligatoires à bord (N – C) ou utile (Q). Les autres sont rarement à bords de nos bateaux pour la bonne raison que plus personne ne les utilisent pour leur fonction première : la transmission par signaux visuels. Radio et téléphone ont pris le relai depuis bien longtemps.


Il reste toutefois un aspect festif qui ne vous a pas échappé : les Pavois. 

LES PAVOIS


Les pavois s'arborent à l'occasion des fêtes locales ou nationales. Le but est de montrer que l'on honore et partage les évènements du pays. 

Le Grand Pavois

Le Grand Pavois est arboré à quai ou au mouillage, jamais en navigation.

Le grand pavois est uniquement composé des 40 pavillons du « Code » dans l'ordre suivant : E Q 3 G 8 Z 4 W 6 P 1 I apercu T Y B X 1er substitut H 3ème substitut D F 2ème substitut U A O M R 2 J O N 9 K 7 V 5 L C S

Cet ordre est celui généralement admis.


Et plus particulièrement pour un sloop :

  • Etrave > Tête de mât = E Q 3 G 8 Z 4 W 6 P 1 I aperçu T Y B X 1er substitut H 3ème substitut
  • Tête de mât > Poupe = D F 2ème substitut U A O M R 2 J O N 9 K 7 V 5 L C S


Et plus particulièrement pour un ketch  :

  • Etrave > Tête de grand mât = E Q 3 G 8 Z 4 W 6 P 1 I aperçu T
  • Tête de grand mât > Tête artimon = Y B X 1er substitut H 3ème substitut D F 2ème substitut U A O
  • Tête artimon > Poupe = M R 2 J O N 9 K 7 V 5 L C S


Il est élégant et permis de hisser un pavillon national à chaque tête de mât, même si cela demande un peu de préparation.


L'idéal est d'avoir des sections de pavois qui tombent juste avec les écarts entre les points de fixation. Ce ne sera jamais le cas, à moins de faire faire votre pavois à mesure (voir ci-dessous : « Où acheter »).


Sinon placez votre pavois pour qu'il fasse une ligne continue dans les hauteurs et rallonger dans les bas avec du bout. Mais surtout, surtout, n'exhibez pas le « pavois rose et jaune » made in China, acheté au kilomètre chez les shipchandlers peu scrupuleux de ce qui nous reste comme étiquette.


Un grand pavois bien arboré, c'est splendide et vous en serez le premier ému.


 

Le Petit Pavois

Celui-ci a été créé pour naviguer sans le tracas que causerait le Grand Pavois. Le petit pavois se compose simplement d'un pavillon national en tête de chaque mât et d'un pavillon national de plus petite dimension (25% de l'arrière) dans le balcon avant. Ceci en plus du pavillon national de poupe.


Si le petit pavois est porté en honneur d'une nation étrangère. Il faut remplacer en tête du plus grand mât, le pavillon national par celui de la nation à honorer.


Ces pavillons ont la préséance de place sur tous les autres habituellement arborés.


Drôlement compliqué tout cela ! 

MATIERE DES PAVILLONS


On distingue essentiellement deux tissus de fabrication :


Un pavillon en étamine peut durer jusqu’à deux fois longtemps qu’un pavillon en maille.


 

OU ACHETER LES PAVILLONS ?


En Europe, on trouve facilement les pavillons de courtoisie des pays qui sont les destinations communes des croisières estivales, c'est à dire les pays européens et ceux du pourtour méditerranéen. On ne trouve pas chez les shipchandlers européens, les pavillons des Turks and Caicos, des Bahamas ou même du Cap Vert. Le marché est trop petit.


Ce n'est pas bien grave, car au fur et à mesure de l'avance du voyage, on peut acquérir ces pavillons. Aux Caraïbes, vous trouverez la panoplie de l'arc antillais chez Budget Marine ou Island Water World.


En Martinique et Guadeloupe, faites faire ce que vous voulez chez WIND FLAG.


Il est parfois possible de s'en faire faire une série à bon compte. Je pense en particulier à Gersonito qui traîne toujours en saison sur les quais de Salvador de Bahia et qui fabrique tous les pavillons souhaités. Ceci pour un prix modique et pour une qualité remarquable (Gersonito – Fabricação de bandeiras – 9948-6915).


Si toutefois, vous voulez vraiment vous équiper avant de partir, vous pouvez les fabriquer vous-même. Pour vous aider, je vous invite à vous replonger dans la galerie des drapeaux des pays du monde sur Wikipedia.


Ou vous les faites fabriquer (www.undrapeau.com 04 94 10 63 35 ou dejean-drapeaux.com/ 05 56 29 01 09 ou www.drapeaux-flags.com 04 22 14 09 61). Bien entendu, ces ateliers fabriquent également des pavillons nationaux.


Pour le Grand Pavois, vous devriez trouver plusieurs tailles chez Borney (www.borney.fr 02 33 35 99 00). 

CONCLUSIONS


En matière d'étiquette et de pavillonnerie, personne de détient la connaissance totale. Je fais d'ores et déjà mon mea culpa sur les manquements et les éventuelles erreurs de ce dossier. C'est avec intérêt que j'attends les commentaires constructifs de ceux qui souhaitent réagir pour peaufiner cet article.


Dans ce monde de traditions hérité des anciens, l'on hisse ou envoie les couleurs la journée, pour les rentrer avant la nuit. Evitez de dire que vous amenez vos couleurs, la signification en est tout autre … (se rendre à l'ennemi).


Et si vous êtes l'heureux propriétaire d'un cat boat (mât posé sur la quille et non haubané). Vous n'avez pas de barres de flèche, ni de drisses de pavillon. Il ne vous reste plus qu'à naviguer tristement dans votre pays, sans club, de façon anonyme. Vous pouvez oublier tout ce que vous venez de lire. Quelle misère !


Cliquer ici pour télécharger une plaquette des signaux.

Crédit photos : Patrick + quelques free web images.

Cliparts animés : yves.marsal.free.fr/atoutgifs.htm.

Plaquettes code des signaux : theodora.com/flags.


Bibliographie :

Dernière mise à jour de l’article : janvier 2020

Dernières MàJ du site :  Avril 2024

patrick@amelcaramel.net